41° Juste après le 40°
Julie ne put que se rendre à l’évidence, Driss plaisait à la gente féminine. Durant toute leur après-midi en ville, elle avait vu des femmes les regarder, se retourner sur leurs passages, jeter des œillades à son compagnon, ou sourire de toutes leurs dents, décolletés plongeants en avant dès qu’elles passaient à leur hauteur. Mais Driss n’avait à priori rien vu, ou alors il cachait très bien son jeu. Il ne lui avait pas lâché la main une seule seconde, lui caressant légèrement la peau de son pouce ou profitant d’un arrêt devant une boutique pour l’embrasser ou la serrer dans ses bras. Julie ne savait pas trop quoi en penser, elle adorait cette sensation et se sentait en sécurité avec lui, mais une part d’elle-même se demandait si ce n’était pas juste sa façon d’être, et s’il n’était pas comme ça avec chacune de ses conquêtes. La jeune femme secoua la tête pour chasser cette pensée négative de sa tête. Elle voulait profiter de l’instant, savourer le moment.
- Tu as l’air pensif ! li dit Driss, comme s’il lisait en elle.
Face à elle, avec juste une petite table ronde qui les séparait, Driss avait gardé sa main dans la sienne. Julie baissa les yeux et sourit, est-elle si transparente ?
- Oui, je plaide coupable, lui répondit-elle jouant la carte de l’humour en espérant qu’il ne pose pas plus de questions.
- Et tu pensais à quoi ? (Zut râté ! Elle n’allait pas s’en tirer à si bons comptes) Tu peux tout me dire, je suis grand, je peux tout entendre…
- Je ne pensais à rien en particulier, je t’assure…
- N’aies pas peur de me parler, ajouta le jeune homme, je ne veux pas que tu aies peur ou que tu sois mal à l’aise.
- Soit, lui annonça Julie, je ne sais pas si c’est le fait que tu sois présentateur télé ou que tu sois relativement charmant mais je vois un nombre incalculable de femmes te reluquer… Et elle laissa sa phrase en suspens, sentant le rouge lui monter aux joues, elle avait osé, elle avait dit ce qu’elle avait sur le cœur.
Driss la fixa un instant, très sérieux, puis il sourit.
- Serais-tu jalouse ? la taquina-t-il.
Julie resta bouche bée, il n’avait pas tort. C’était bien cela.
- Euh… Non, enfin oui, peut-être un peu. Merde ! Julie jurait devant sa bêtise.
- Mais c’est trop mignon ! Driss se leva de sa chaise et embrassa Julie à pleine bouche. Après quelques secondes, il s’éloigna mais li colla un dernier baiser sur les lèvres.
La jeune femme ne s’attendait pas à une telle réaction de sa part. Elle pensait qu’il se moquerait d’elle ou ferait le fier, mais surtout pas qu’il s’attarde sur sa réaction à elle. Driss était plein de surprises.
Après avoir pris un déjeuner et discuter un long moment autour d’un café, le couple reprit sa promenade dans le centre-ville. Ils n’avaient aucune idée d’où ils allaient mais ils profitaient l’un de l’autre, découvrant leurs passés, leurs histoires, certaines anecdotes. Julie découvrait Driss et elle l’appréciait d’autant plus. Sans se concerter, ils prirent le chemin du retour. C’était assez étrange de se dire qu’ils vivaient dans le même immeuble, qu’ils se raccompagnaient l’un l’autre et qu’à aucun moment, ils n’auraient à se séparer à la sortie d’un cinéma ou d’un restaurant. Ils pouvaient rentrer tranquillement chez eux et se dire au revoir (ou non) sur le pas de la porte. Julie se sentait ragaillardie par leurs conversations et la franchise dont ils avaient fait preuve durant toute la journée.
Ils en étaient là, marchant l’un à côté de l’autre à une rue de leurs appartements lorsque Julie entendit un léger bruit à quelques mètres d’eux. Elle ne parvint pas à identifier ce dont il pouvait s’agir. Elle s’arrêta d’un coup, tirant sur le bras de Driss qui fut stopper dans son élan.
- Qu’est ce qui se passe ? lui demanda-t-il, tu ne sais plus où tu habites ?
- Attend j’ai entendu un bruit bizarre, répondit Julie aux aguets.
- Euh… d’accord…Driss patienta à ses côtés.
- Chuttttt… Julie avait un doigt sur la bouche et tendait la tête vers là où elle avait cru entendre le premier bruit.
Un grattement provenait d’un tas de cartons près d’une benne à ordure. Julie en était certaine, elle avait entendu quelque chose, elle espérait qu’il ne s’agissait pas d’un rat. La jeune femme lâcha la main de Driss et avança prudemment. Elle se pencha vers la poubelle et souleva du bout des doigts les plis et les replis de cartons. Elle entendit à nouveau le bruit mais plus distinctement à présent.
Lorsqu’elle souleva la dernière pile, son cœur se souleva d’un seul coup. Elle découvrit une boite avec à l’intérieur un minuscule chaton, il devait avoir à peine deux mois. La petit boule de poils était toute noire et avait une unique tâche blanche sur le menton. Il émit un léger miaulement et se recroquevilla sur lui-même en voyant la jeune femme tendre la main vers lui. Julie le prit délicatement dans ses paumes et se releva. Driss assistait à la scène. Tous deux savaient que si Julie ne s’était pas arrêté, le chaton serait sans doute mort dans cette boite ou pire. Elle le cala tout contre elle, et l’entendit ronronner d’aise. Le jeune homme s’avança et gratta la tête de l’animal.
- Alors comment allons-nous l’appeler ? lui demanda-t-il.