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37.2 le matin... ou presque

Publié le par aulivia

Accroupie face à la rampe d’escaliers, Julie était pleinement concentrée sur son activité. Elle voulait à tout prix finir cette première couche de peinture grise afin de pouvoir passer la deuxième couche dès lundi matin. Elle comptait utiliser ses heures de travail du samedi matin pour faire un peu de bureautique et prendre de l’avance sur les quittances de loyers. La fin de mois arrivait très vite et elle voulait être à jour dans toute la paperasse administrative. Elle attaquait les derniers barreaux, tirant la langue et trempant son pinceau à intervalles régulier dans son pot. L’avantage de cette tâche répétitive : elle pouvait réfléchir à autre chose. Elle repensait pour la énième fois à sa rencontre de l’après-midi. Julie espérait juste que la jeune femme brune qu’elle avait rencontrée, l’avait crue et mettrait un terme à cette relation néfaste. Malheureusement et elle devait se rendre à l’évidence, sa curiosité ne serait sans doute jamais satisfaite, elle ne se voyait pas demander à Alexandre des informations concernant son frère. Il pourrait croire qu’elle était retombée dans ses filets. Revoir cet homme avec qui elle avait partagé sa vie pendant cinq ans, brrr ! Julie sentit ses poils se hérisser. Fatima lui avait ouvert les yeux, ainsi que toutes les femmes qu’elle avait côtoyées à l’association. Certaines avaient vécues des années d’humiliations, de sévices corporels et autres maltraitances. Julie avait l’impression au final qu’elle-même s’en était plutôt pas mal sortie. Elle était partie vite et n’avait pas attendu que les coups pleuvent pour prendre les jambes à son coup. C’était grâce à Fatima, elle le savait,  elle lui serait toujours redevable. Julie en était là de ses pensées, son pinceau à la main, lorsqu’elle sentit une présence dans son dos, quelqu’un la regardait. Elle n’avait même pas entendu la porte du hall s’ouvrir, totalement perdue dans ses réflexions.

Oh mon dieu, se dit Julie… Et si c’était Driss… Quelle heure pouvait-il bien être ? Il ne pouvait pas rentrer si tôt ? Elle sentait la transpiration, la poussière, la peinture… Juste impossible ! Il ne fallait pas qu’il la voit comme ça !

Julie se passa la main dans les cheveux, omettant qu’elle tenait un pinceau couvert de peinture grise. Elle avait maintenant une magnifique mèche ainsi que sa tempe gauche, couvertes de peinture. Pitié ! Pas Driss…

La jeune femme se retourna. C’était pourtant lui qui était là, face à elle. Il pencha la tête, souriant, franchement amusé par l’apparence de la jeune femme. Lui par contre, Julie devait le reconnaître, était toujours aussi beau. Vêtu d’un costume gris foncé, et d’une chemise noire, sous sa veste trois quart. Il paraissait tout droit sorti d’une publicité pour un parfum. Bon, Julie pouvait se l’avouer, elle craquait pour son voisin. Il fallait se rendre à l’évidence. Et forcément avec un sourire pareil, elle n’avait qu’une envie, l’embrasser.

Driss se rapprocha et posa délicatement son pouce sur sa tempe. Il essuya la trace de peinture dont elle s’était tartinée quelques secondes auparavant. Il laissa sa main trainer sur sa joue. Il se pencha, lui tenant la tête de sa main et l’embrassa. Sa langue s’insinua dans la bouche de la jeune femme. Leurs langues se rencontrèrent et s’épousèrent l’une l’autre, telle une caresse. Julie ferma les yeux et savoura l’instant. C’était tellement agréable de se sentir désirée.

Driss mit fin à cet échange, doucement, comme si lui aussi n’avait pas envie que cela se termine. Il prit enfin la parole.

    - Hello ma belle, tu as passé une bonne journée ! lui demanda-t-il.

   - Oui et toi ? répondit Julie, qui se sentait virée au rouge (« Ma belle «  alors qu’elle était couverte de peinture…voyons !) Je n’ai pas vu l’heure passer, je voulais terminer cette première couche avant le week-end.

   - Ma journée a pris une tournure beaucoup plus agréable depuis que j’ai passé la porte de l’immeuble, dit-il, en la prenant par la taille. Tu as quelque chose de prévu ce soir ?

   - Euh, ce soir, mise à part prendre une douche…

   - C’est une invitation ? dit Driss hilare. Il aimait bien la taquinée et la mettre mal à l’aise.

   - Non, pas du tout ! Julie voulut jouer la courroucée mais souriait de la répartie du jeune homme.

   - Je sais bien, dit-il pour la rassurer, j’aime bien te taquiner, te voir virer au rouge à chaque fois, j’adore ça, tu es très jolie quand tu es gênée, Julie. Mais plus sérieusement, si tu n’as rien de prévu ce soir, on pourrait aller manger un morceau ensemble, il y a un restaurant japonais à quelques rues d’ici.

   - Ah… Julie avait du mal à déglutir. Euh oui pourquoi pas. Si tu veux !

   - Evidemment, je ne te le proposerais pas sinon ! Je te laisse finir, et je passe te prendre à 19H30, il leva le menton de la jeune femme du bout des doigts et l’embrasse sur les lèvres. Pas besoin de me donner ton adresse, je la connais.

A peine avait-il finit sa phrase qu’il enjamba le pot de peinture et grimpa les marches deux par deux. Julie était toujours debout et l’écoutait monter les escaliers. Pffiou, elle allait dîner avec Driss ce soir. Elle n’avait plus de temps à perdre. Il fallait qu’elle se prépare. La jeune femme baissa les yeux pour contempler sa tenue de travail et se rendit compte qu’elle avait laissé le pinceau goutter sur le sol. Zut ! Il fallait qu’elle nettoie d’abord tout son bazar.

Julie était dans sa chambre. Elle avait son téléphone dans la main et mourrait d’envie d’appeler Fatima pour savoir quelle tenue mettre pour un premier dîner au restaurant. Cela faisait tellement longtemps qu’elle n’avait pas eu de rencard. Bon, il ne s’agissait que d’un repas dans un restaurant du coin, endroit qu’elle connaissait pour y prendre très, trop régulièrement des repas à emporter mais tout de même, elle ne pouvait pas y aller en serviette de bain. La jeune femme était assise sur son lit, les portes de son armoire grandes ouvertes. Elle hésitait entre un jean brut et un pull vert qui mettait en valeur sa couleur de cheveux ou une robe pull grise avec un legging noir. Douze mille questions tournaient dans sa tête. Et s’il voulait marcher ensuite, comme dans les films où les tourtereaux se promenaient des heures durant dans la nuit, s’échangeant des anecdotes et se tenant chastement par la main. Quelle paire de chaussures mettre ? Avec son jean, elle pouvait mettre des ballerines ou des talons compensés mais avec son legging, il fallait qu’elle porte des chaussures plus habillées. Mon dieu ! Julie se détestait quand elle était comme ça, elle avait l’impression de ressembler à une adolescente pour sa première boum, ou pire, à sa mère !

Voyant l’heure défiler, elle opta pour la robe pull avec une paire de collant noire et des ballerines grises. Elle serait à l’aise tout en étant jolie. Julie était en train de mettre une dernière touche à sa tenue, en enfilant un long sautoir composé de perles vertes et grises lorsqu’elle entendit Driss frapper à sa porte. Elle enfila ses chaussures et se dirigea vers la porte.

Driss était là. il la regarda des pieds à la tête et lui fit son sourire le plus charmant. Elle fondait. Il avait troqué son costume pour un jean foncé et un gros pull en laine bleu foncé à col haut surmonté de gros boutons noirs.

   - Tu es ravissante dans cette tenue, lui dit-il en guise de bonsoir.

Julie lui demanda de patienter quelques secondes, le temps qu’elle récupère sa veste et son sac à main. Elle glissa son téléphone ainsi que ses clefs à l’intérieur après avoir pris soin de fermer la porte de la loge.

La soirée se déroulait à merveille. Julie passait un moment très agréable. Driss lui avait proposé de choisir la table puis sa place, il lui avait laissé le soin de commander son apéritif ainsi que la boisson pour accompagner le repas. Il prenait un malin plaisir à la faire rire en lui racontant toute sorte d’anecdotes liées à son travail. Lui savait ce qu’elle faisait mais deux heures auparavant et mise à part ses baisers et ses innombrables conquêtes, Julie ne connaissait pas grand-chose de l’homme avec qui elle passait la soirée. Elle avait commencé à lui poser de questions dès l’apéritif. Elle voulait savoir à qui elle avait à faire. Lorsqu’il lui avait appris qu’il travaillait en tant que présentateur « vedette » sur la chaîne de télévision de la région, Julie resta bouche bée. Elle dût lui avouer qu’elle n’avait jamais regardé la chaîne mais Driss n’avait pas bronché. Pire, il avait aimé cette « innocence » de sa part, ne pas être reluqué de la tête au pied comme un morceau de viande et ne pas se dire qu’elle allait lui demander des contacts avec telle ou telle star de la télévision pour devenir chanteuse ou actrice, c’était reposant ! Au final, elle comprenait pourquoi toutes les filles étaient à ses pieds et se laissaient mener par le bout du nez. Il savait s’y prendre et jouait de cet avantage.

Entre deux sushis, Driss lui prenait la main ou se penchait pour l’embrasser délicatement. Il paraissait avoir tout aussi faim de Julie que de ce qu’il avait dans son assiette. Julie quant à elle, avait beau apprécier la soirée, elle se demandait ce qui allait se passer lorsqu’ils arriveraient devant la porte de la loge. A ce moment précis, elle ne savait toujours pas si elle serait prête à aller plus loin avec lui. 

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